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Maxime PINEAUX - Doctorant en biologie - Demi-finaliste régional de MT180 2019

Portrait d'alumni

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22/11/2019

Doctorant en biologie
Prix du Public, Ma thèse en 180s, édition régionale 2019
Année prévue de soutenance de thèse : fin 2019
Université Toulouse III - Paul Sabatier
École doctorale SEVAB
Laboratoire : évolutions et diversités Biologiques (EDB), CNRS / IRD

(c) UFTMP

Parle nous un peu de toi.

Je m’appelle Maxime Pineaux, j’ai 26 ans et je suis originaire de la ville peu connue de Melle, située dans le département non moins connu des Deux-Sèvres, lui-même situé dans la région tout aussi peu connue du Poitou-Charentes. Grandir dans ce coin reculé (ce qui est loin d’être péjoratif pour moi) a fait que j’ai passé beaucoup de temps à baguenauder en forêt, dans les champs, les marais, et surtout à observer les bestioles qui peuplaient ces lieux. J’ai donc très rapidement eu un intérêt assez marqué pour les sciences naturelles. En dehors de ça, j’ai toujours aimé cuisiner et j’ai même failli me diriger vers cette voie à la fin de mes années collège. Je crois que j’arrive à trouver dans le métier de chercheur ce que j’aime dans la cuisine. S’informer sur ce qui se fait, utiliser ces connaissances pour innover, essayer de comprendre pourquoi ça ne marche pas, recommencer et partager. J’ai fait aussi beaucoup de sport, du badminton au foot, en passant par le tennis. Et j’ai surtout une passion dévorante pour la bande dessinée et les fictions policières (et encore plus pour les deux en même temps !), surtout lorsque c’est accompagné d’un humour décalé et grinçant (comme la série de bandes dessinées « Détectives » ou les romans de Fred Vargas).

Et sinon concernant ma vie académique, j’ai changé de ville assez souvent. J’ai fait mes deux premières années de Licence de Biologie à Poitiers, puis je suis parti faire ma troisième année de Licence en échange à l’étranger, à l’Université Laval, qui est située dans la ville de Québec au Canada. C’est là-bas que j’ai eu une première vraie expérience de recherche, dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche qui a duré une année et pendant lequel j’ai travaillé sur le conflit sexuel chez les patineurs. Les patineurs étant bien sûr le nom québécois d’une espèce d’insecte qui marche sur l’eau (mais qui ne change pas l’eau en vin, ne vous emballez pas) et que l’on appelle plus couramment punaise d’eau ou gerris. A la fin de ma Licence, ce même labo m’a offert une bourse de recherche de deux ans pour faire une maîtrise (l’équivalent du master français, mais qui ressemble plus à une mini-thèse avec quelques cours) sur le même sujet. Ces deux années m’ont conforté dans l’idée de faire de la recherche et c’est comme ça que je me suis retrouvé à passer le concours de l’école doctorale SEVAB à Toulouse en 2016 !

Dans le style de Ma Thèse en 180 secondes, mais à l'écrit, parle-nous de ta thèse. 

« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » disait Lamartine. « Ça c’est surtout vrai si vous n’aviez pas pris le premier venu hein ! » disait Maurice, le voisin de comptoir beaucoup moins connu de Lamartine.

On ne badine pas avec le choix de partenaire ! Mais sur quoi les animaux se basent-ils pour faire le bon choix ? En biologie évolutive, on distingue deux types de bénéfices qu’un partenaire peut nous apporter. Il y a les bénéfices directs, immédiats, par exemple des bénéfices alimentaires. On a tous un jour choisi quelqu’un parce qu’il avait une maîtrise parfaite de la choucroute. Ah non ? Pas vous ?  Bon. Et il y a les bénéfices indirects. Ça ce sont les bénéfices génétiques. C’est-à-dire que le partenaire est choisi pour sa bonne qualité génétique, qu’il va transmettre à vos descendants.

Je m’intéresse à ces bénéfices génétiques chez un oiseau marin, la mouette tridactyle. Alors non, je ne voue  pas un culte obscur aux mouettes, je les ai choisis parce qu’elles sont monogames. Donc c’est d’autant plus important pour elles de ne pas choisir le premier venu comme partenaire. Les gènes qui m’intéressent jouent un rôle fondamental dans la protection face aux maladies chez les vertébrés (donc vous, moi, les marmottes, les poules...). Ce sont les gènes du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH). Ces gènes du CMH permettent de détecter et de se débarrasser des parasites lorsqu’ils entrent dans votre corps. Et il existe plein de versions différentes de ces gènes, qu’on appelle des allèles. Chaque allèle permet la détection d’un type de parasite, si bien que plus vous avez d’allèles différents, plus vous êtes protégé face à différents types de parasites. Pour avoir des descendants en bonne santé, un individu devrait donc choisir un partenaire qui n’a pas les mêmes allèles du CMH que lui. Ainsi, leurs descendants auront plein d’allèles du CMH différents ! Et ça c’est très important pour les poussins mouettes car on a découvert que plus ils avaient d’allèles du CMH différents, plus ils avaient de chance de survivre, moins ils avaient de parasites, et plus ils grandissaient rapidement.

Et dans les faits, qu’est-ce que je fais ? J’observe les mouettes pour savoir qui se met en couple avec qui, je les capture pour faire une petite prise de sang que j’utilise pour déterminer leur CMH avec des méthodes moléculaires, et je surveille l’état de santé de leurs poussins jusqu’à leur envol. Mais comment faire ça concrètement ? Les mouettes font leur nid sur les falaises en bord de mer, endroits généralement difficilement accessibles, ce qui rend compliqué les observations et les captures sans risquer de mourir. Pour pallier à ces problèmes, je vais faire mes observations sur la minuscule île de Middleton située au large de l’Alaska. Alors non, aucun rapport avec la princesse, on est d’ailleurs loin du luxe de la famille royale puisqu’il n’y a ni bâtiment où dormir, ni eau courante ! Alors pourquoi cette île-là en particulier ? Son originalité vient du fait qu’il y a une ancienne tour radar de l’US Air Force qui a été réaménagée pour pouvoir facilement observer et capturer les oiseaux. L’US Air Force avait déserté l’île dans les années 60 après un tremblement de terre qui avait détruit la plupart des bâtiments. Et une vingtaine d’années plus tard, un chercheur américain, Scott Hatch, s’est intéressé à l’île parce qu’elle était habitée par plusieurs espèces d’oiseaux marins. Il s’est rendu compte que les mouettes tridactyles faisaient leur nid sur les parois de l’ancienne tour radar. Et là il a eu l’idée assez folle de réaménager la tour pour facilement observer ces nids et capturer les oiseaux. Maintenant, quand vous entrez dans cette tour, il y a 400 miroirs sans tain autour de vous, chacun donnant sur le nid d’un couple de mouettes, ce qui permet de les observer sans qu’elles nous voient ! En passant, je vous encourage à aller voir des photos de cette île, avec une petite musique inquiétante en fond, pour pleinement apprécier son côté post-apocalyptique.

Cette proximité avec les oiseaux m’a aussi permis d’essayer de comprendre comment les mouettes peuvent identifier le « bon » partenaire, celui avec le « bon » CMH. Alors non, elles ne demandent pas à toust leurs prétendants ou prétendantes de se faire une prise de sang. Question de praticité. Non, il faut aller voir ailleurs, et avoir le nez fin car le candidat le plus souvent étudié, qui permettrait de révéler des informations sur le CMH, c’est l’odorat ! Plusieurs études ont montré chez quelques espèces d’animaux que les caractéristiques du CMH sont « encodées » dans les odeurs corporelles. Même chez nous, les humains ! Pour tester ça, des chercheurs ont fait porter des t-shirts à des hommes pendant 3 jours non-stop, puis ils ont fait sentir ces t-shirts à des femmes. Et celles-ci préféraient l’odeur des hommes avec un CMH différent du leur !

Mais revenons à nos mouettes. Je vous vois venir, mais non, je n’ai pas tricoté des petits pulls aux mouettes pour tester leur préférence. A la place, je leur ai présenté des plumes et des morceaux de nids, qui puent, vraiment, et comme les humains, les mouettes acceptaient plus souvent dans leur nid les échantillons qui venaient d’un oiseau au CMH différent du leur.

Outre le fait que ces recherches nous permettent de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents au choix de partenaire et à la résistance aux maladies, elles nous indiquent aussi un très gros potentiel pour créer une agence de rencontres pour mouettes qui se baserait sur le CMH, la bien-nommée Mouettic, site de rencontres pour mouettes célibataires ! Bon ça reste un public de niche tout de même…

Que t'a apporté la formation MT180 qui à ton avis te sera utile dans ta poursuite de carrière ?

Parler avec aisance à l’oral, avoir le bon ton, les bons gestes, les bons mouvements puisqu’on est très souvent amené à présenter nos travaux oralement.

Apprendre à utiliser nos qualités et nos défauts pour créer quelque chose d’original mais qui nous ressemble. Pas seulement pour de la médiation scientifique, mais aussi pour les publications académiques, qui manquent souvent d’attrait car écrites dans un style trop formaté.

Des contacts ! Avec des doctorants qui peuvent venir de domaines très différents du mien, et que je n’aurai certainement pas pu rencontrer sans cette formation. Déjà ça fait des supers rencontres, mais c’est aussi toujours important de connaître des bons communicants dans plein de domaines différents. Déjà pour se cultiver et rester informé de ce qui se passe en dehors de mon petit domaine de compétences, car c’est comme ça que de nouvelles idées viennent. Mais aussi pour organiser des évènements de médiation scientifique, par exemple Pint of Science (20, 21, 22 Mai 2019, venez !), et avoir l’assurance que le message sera bien transmis.

De confirmer l’importance de montrer nos recherches aux gens et pas seulement ceux du monde académique. Rester dans sa tour d’ivoire, sans communiquer ses travaux à d’autres personnes que ses collègues, c’est ce qui a notamment créé, et est en train de créer, une défiance ou un manque d’intérêt envers le monde de la recherche. Bien sûr MT180 n’est pas formaté pour faire comprendre une recherche de longue haleine en seulement 3 minutes, mais elle doit être vue comme une quatrième de couverture (pour piquer l’expression de Bertrand Perrier, le parrain de l’édition 2019). Une quatrième de couverture qui doit donner envie aux gens d’aller se renseigner un peu plus sur un sujet précis ou sur un domaine plus large, et puis peut-être de les intéresser au monde de la recherche française, son fonctionnement et les problèmes qu’il rencontre.

Que souhaiterais-tu dire aux Docteurs du réseau de l'Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées ainsi qu'aux autres doctorants actuels ?

Doctorantes, doctorants, vous êtes experts dans votre domaine, n’ayez pas peur de montrer ce que vous faites au grand public !


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