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Marianne VERGEZ-COURET - Docteure en Sciences du Langage

Portrait d'alumni

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17/10/2019

Docteure en Sciences du Langage
Thèse soutenue en 2010
Université Toulouse - Jean Jaurès
École doctorale CLESCO | Laboratoire CLLE-ERSS

(c) Clémentine Adam

Qui es-tu ?

Je suis docteure en sciences du langage. J'ai obtenu mon diplôme à Toulouse à l'Université Toulouse - Jean Jaurès où j'ai passé toutes mes études. Aujourd'hui, je vis entre Toulouse - avec ma famille et Poitiers où je viens d'être nouvellement recrutée.
J'ai beaucoup de passions que j'aime partager en famille mais si je ne devais en citer qu'une je dirai les traditions (l'occitan, l'accordéon diatonique, les musiques et danses traditionnelles...).

 

Parle-nous de ta thèse !

J'ai soutenu ma thèse en 2010. Je faisais alors partie du laboratoire CLLE-ERSS (Cognition, Langues, Language et Ergonomie-Équipe de Recherche en Syntaxe et Sémantique) et de l'école doctorale CLESCO (Comportement, Langage, Education, Socialisation, Cognition).

Dans ma thèse, je pars de l'idée qu'il est possible de modéliser la structure des discours, autrement dit de décrire et prédire l'enchaînement des énoncés (instanciées par des phrases). Finalement on se pose la question de comment à partir du contenu de tous les énoncés produits les uns à la suite des autres, les locuteurs ou lecteurs, arrivent à se faire une représentation cohérente de l'ensemble. En fait, le contenu de cet ensemble est plus riche que le contenu de chaque énoncé pris bout à bout. Nous pouvons illustrer cela avec l'exemple suivant : "Paul est tombé. Pierre l'a poussé" qui peut donner lieu à deux interprétations différentes : une interprétation consiste à considérer les deux événements comme se produisant de façon successive : "Paul est tombé. Puis Pierre l'a poussé". Une autre interprétation possible est : "Paul est tombé. Parce que Pierre l'a poussé". Nous voyons là que la représentation cohérente que l'on se fait dépasse le strict contenu des énoncés avec dans un cas l'interprétation de séquentialité et dans l'autre cas l'interprétation de causalité. Vous vous doutez bien que la tâche n'est pas aisée puisqu'il n'est pas rare qu'un discours puisse donner lieu à différentes interprétations !

En partant des modèles théoriques de la construction des discours, je me suis intéressée à la relation d'Élaboration, qui était alors moins étudiée que la séquentialité et la causalité. Mon travail a porté sur la définition, la description et les caractéristiques linguistiques de la dite relation que j'illustre avec cet exemple issu du Petit Prince de Saint-Exupéry : "Au matin du départ il mit sa planète bien en ordre. Il ramona soigneusement ses volcans en activité. (...) Il ramona donc également le volcan éteint. (...) Le petit prince arracha aussi, avec un peu de mélancolie, les dernières pousses de baobabs". Les relations qui unissent les énoncés suivants sont ici de nature différente. L'événement décrit sans la première phrase, "mettre sa planète bien en ordre", est développé dans les énoncés suivants : "ramoner ses volcans en activité", "ramoner le volcan éteint" et "arracher les dernières pousses de baobabs", qui sont eux sur le même plan dans la mesure où ils poursuivent le développement de l'Élaboration, interprétation qui est facilitée par les adverbes d'addition, "également" et "aussi".

Mon travail consistait alors à mettre au jour les éléments qui permettent l'interprétation de l'Élaboration. Il est notamment possible de contraster cet exemple avec une paraphrase incluant un marqueur explicitant la relation, "pour commencer" : '"Au matin du départ il mit sa planète bien en ordre. Pour commencer, il ramona soigneusement ses volcans en activité". Mais en l'absence de marques lexicales, d'autres éléments rendent néanmoins possible une interprétation similaire sur la base de connaissances du monde, de la lecture des premières pages du livre, de la valeur englobante de "mettre en ordre" qui permettent de comprendre que "ramoner les volcans", "arracher les pousses de baobabs" sont des types d'événement participant à la "mise en ordre de la planète" à condition de produire les analogies entre "planète" et "maison", "volcans" et "cheminées", "pousses de baobabs" et "mauvaises herbes". Les exemples que j'ai considérés dans la thèse étaient issus d’articles de presse, d’articles scientifiques et d’articles de Wikipedia, donc bien moins poétiques, mais mettaient tout aussi bien en évidence l’importance des connaissances du monde et du contexte discursif pour l’interprétation de la relation d'Élaboration.

Quelle est ta profession actuelle ? 

Je suis actuellement Maître de conférences à l'Université de Poitiers. On peut dire que ce métier d'enseignant-chercheur est une poursuite logique à laquelle le doctorat m'a préparé. Il m'a néanmoins fallu être patiente pour décrocher ce contrat, 8 ans après la soutenance de ma thèse. Aujourd'hui, j'ai deux grandes missions, une mission d'enseignement et une mission de recherche. Dans chacune de ces deux missions, sont également associées des responsabilités administratives qui sont grandissantes dans le contexte universitaire.

Dans l'idéal, il faudrait consacrer 50% de son temps pour chacune de ses deux grandes missions mais je n'ai pas trop de recul sur la réalité du terrain étant donné que je viens tout juste d'être recrutée.

Quelles sont les compétences techniques et les compétences humaines (on parle aussi de soft skills) que tu peux clairement lier, avec le recul, à ton expérience de doctorat  ?

Heureusement, la thèse ne prépare pas uniquement au métier d'enseignant-chercheur, j'ai toujours pensé que mes expériences du doctorat et des post-doctorats pourraient être mises à profit dans d'autres métiers, notamment à travers les activités d'analyse, de synthèse, de rédaction, de présentation orale, l'utilisation avancée des logiciels de bureautique (word, excel...) et d'outils plus spécifiques pour la linguistique (langage de programmation).

Ça fait quoi d'être Docteure, au quotidien?

Le fait d'être Docteure n'a pas changé grand chose à mon quotidien mais j'en suis très fière. Par ailleurs, ce statut m'a permis d'accéder à des contrats post-doctoraux très intéressants et au métier de Maître de conférences.

Quels souvenirs gardes-tu de ton doctorat ? 

Je garde beaucoup de bons souvenirs de mon doctorat et surtout de belles amitiés. J'ai presque oublié tous les moments difficiles : ils m'ont appris à gérer le doute (qui est inévitable je crois dans les métiers de l'enseignement et de la recherche), à me remettre en question et m'ont forgé en tant qu'enseignant-chercheur.

Que souhaites-tu dire aux autres Docteurs du réseau de l'Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées ainsi qu'aux doctorants actuels ?

Je souhaite féliciter tous les docteurs , le doctorat est une épreuve et nous devons tous nous féliciter d'être allés jusqu'au bout, d'autant plus que le statut n'est pas du tout reconnu en France ; encourager tous les doctorants dans leur parcours ; et tous ensemble espérer que nous puissions redorer le blason des jeunes chercheurs en France.

Question bonus : qu'attendrais-tu d'un réseau Toulouse Alumni Docteurs ?

Ce que j'attendrais d'un réseau alumni docteurs serait de faire reconnaître le statut de docteur en France, convaincre les entreprises du bien-fondé du recrutement de jeunes docteurs et créer un réseau d'entraide entre doctorants et jeunes docteurs sur le marché de l'emploi notamment.


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