Bénédicte RIGOU-CHEMIN - Docteure en Anthropologie sociale et historique
Docteure en Anthropologie sociale et historique
Thèse soutenue en 2011
Université Toulouse Jean Jaurès / EHESS
École doctorale TESC /LISST
Qui es-tu ?
Je suis mariée, je vis à Toulouse avec ma famille depuis 2005. J'ai quatre grands enfants, deux sont encore étudiants à Toulouse. C'est en arrivant ici après plusieurs déménagements aux quatre coins de la France que j'ai pu compléter mon cursus universitaire en réalisant une thèse de doctorat en anthropologie à l'EHESS. J'avais démarré mes études à Bordeaux puis à Paris pour le M1 et M2. Entre temps, j'avais travaillé dans le domaine culturel, plus particulièrement dans des musées et m'étais formée au métier de journaliste. En 2001, j'ai crée une première activité indépendante qui s'appelait Porteur de mémoire grâce à laquelle j'écrivais des récits de vie. C'était déjà un premier pas dans l'entrepreneuriat.
Parle-nous de ta thèse !
J'ai été inscrite en thèse de 2006 à 2011 avec l'école doctorale TESC à l'université Jean Jaurès. Je suis rattachée au Centre d'anthropologie Sociale (CAS) qui dépend du LISST et j'ai réalisé ma thèse en anthropologie sociale et historique sous la direction de Jean-Pierre Albert, Professeur Emérite à l'EHESS puisqu'il dirigeait alors la chaire d'anthropologie du religieux. Je n'ai pas trop chômé pendant ces années de thèse car c'était pour moi une reprise d'étude et que j'étais donc un peu plus âgée que les étudiants sortant de M2. J'ai beaucoup aimé ces années à l'EHESS. Elles se composaient de séminaires, journées d'études, j'ai pu partir à Belgrade pour une université d'été sur le religieux contemporain. La vie du labo était assez intense et amicale. J'ai rencontré beaucoup de bienveillance et de professeurs encourageants.
J'ai donc soutenu ma thèse en octobre 2011. Cela fera bientôt 10 ans, mais l'impression reste encore très vive tant la soutenance a été un rite de passage soutenu. Impossible d'oublier la présence comme présidente de Madame Hervieu-Léger, le professeur le plus reconnu au plan académique sur la question du religieux contemporain.
Il y a 10 ans, la mode n'était pas au pitch, mais en quelques mots je dirais que ma recherche portait sur une catégorie de personnes dans l'Eglise catholique que j'ai nommée les "Virtuoses du religieux" en paroisse. Ce sont autrement dit les personnes jeunes ou moins jeunes dés lors qu'elles sont engagées dans l'animation de la vie paroissiale. Il s'agit donc d'une étude portant sur la gouvernance au sein de l'Eglise catholique s'appuyant sur deux terrains d'observation toulousains: une paroisse animée par une communauté religieuse masculine particulièrement dynamique, près du Jardin des Plantes et la Paroisse étudiante qui venait d'être créée , à la demande du Pape Benoit XVI et qui était assez révolutionnaire dans son approche. J'ai essayé de montrer comment dans les deux cas, naissent des initiatives, les ressorts grâce auxquels des laïcs s'investissent pour dynamiser leur paroisse respective mais aussi les tensions et les difficultés liées à une institution qui s'essouffle. Puisque c'est une étude anthropologique, elle se base sur des observations de terrain et de nombreux témoignages.
As-tu une anecdote à partager ?
Pendant la thèse j'ai fait ce qu'on appelle en anthropologie du terrain pour recueillir des données. A cette occasion, lors d'une université d'été à Belgrade avec l'EHESS de Paris et l'IEP de Belgrade, j'ai dû partager non seulement la chambre mais aussi le lit (grande taille ouf !!! ) d'une étudiante serbe faute de chambre suffisante. Nous n'avions que l'anglais en commun. La semaine suivante, tout juste rentrée, j’enchaînais une observation de 4 jours à Lourdes à l'occasion d'un grand rassemblement et l'on m'attribua cette fois-ci, la même chambre qu'une religieuse péruvienne effrayée à l'idée de partager son séjour avec une non-religieuse. Comme je lui racontais l'anecdote que je venais de vivre quelques jours plus tôt, au lieu de la rassurer, j'ai vu son visage pâlir. J'ai eu quelques minutes l'impression d'être une sorte de diable à ses yeux. Cela me fait encore rire quand j'y pense.
Quelle est ta profession actuelle? (quelles sont tes missions, que fais-tu au quotidien ou de façon hebdomadaire, comment vois-tu ton métier, comment es-tu arrivé·e là)
J'ai beaucoup louvoyé dans ma vie professionnelle, parce que ce n'est pas tous les quatre matins que l'on recherche un anthropologue. J'ai pratiqué le journalisme une quinzaine d'année, l'enseignement, exploré le monde de la librairie. Finalement, forte de toutes mes compétences, j'ai décidé de créer ma propre activité indépendante. Je suis donc depuis 2017 la fondatrice et dirigeante de Scrib et Associés qui est un cabinet d'études sociétales et de communication rédactionnelle au service des entreprises, des organisations ou de toutes personnes indépendantes. Enquêtes qualitatives sur mesure, histoire sociale des entreprises pour en transmettre la mémoire, biographies familiales. Je réalise également des portraits à l'attention de dirigeants, d'artistes, de créateurs d'entreprise pour mettre en avant les traits de caractère d'une personne en responsabilité. La valeur ajoutée de mon travail c'est de mettre du cœur et de l'âme dans une communication en apportant des éléments authentiquement différenciant et impactant.
Quelles sont les compétences techniques et les compétences humaines (on parle aussi de soft skills) que tu peux clairement lier, avec le recul, à ton expérience de doctorat ?
En Doctorat, j'ai appris la rigueur des sciences humaines avec leur méthodologie précise, j'ai appris à manier la boite à outils de la discipline grâce aux enquêtes qualitatives, aux entretiens semi-directifs, au travail de terrain, à la traduction de discours complexe en discours accessible. J'ai surtout appris des savoirs-êtres : la qualité d'écoute, d'empathie, la bienveillance pour me mettre quelque soit le sujet à hauteur d'hommes et non en sachant. J'ai appris la persévérance, j'ai appris à montre un projet, à le valoriser par des communications scientifiques... je vois le doctorat comme une véritable aventure intellectuelle et humaine.
Ça fait quoi d'être Docteur, au quotidien ? Est-ce que ça t'a ouvert des portes ? Est-ce que c'est une expérience que tu valorises ?
Le Doctorat est un grade que nul ne discute. Il me donne donc une légitimité de chercheur à ce titre aussi, il me donne des responsabilités. Je ne le mets pas systématiquement en avant mais il est très utile pour justifier mon activité de recherche. Parfois trop de diplômes peut aussi desservir. Il faut savoir le mettre en avant lorsque c'est nécessaire. Grâce à cela aussi, je peux enseigner à l'Université, participer à des colloques. Bref, faire de la recherche académique et de la recherche appliquée.
Que souhaiterais-tu dire aux autres Docteurs du réseau de l'Université de Toulouse ainsi qu'aux doctorants actuels ? As-tu des conseils ?
En sciences humaines le doctorat n'est pas une fin en soi. Je suis fière de mon diplôme mais après cela, il faut encore acquérir des connaissances dans le domaine où l'on veut s'investir. Grâce à mes années de thèse, je sais que je suis capable d'assumer une charge importante de travail. Persévérer, ne pas se décourager mais chercher une professionnalisation efficiente pour laquelle l'université ne délivre pas beaucoup de clés.
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