Aude GREZY, Doctorat en Epigénétique et rédactrice scientifique freelance
Doctorat en Epigénétique
Thèse soutenue en 2015
Université Toulouse Paul Sabatier
École doctorale BSB/ LBCMCP - CBI
Qui es-tu ?
Bonjour, je suis Aude Grezy. J'ai 32 ans et je vis entourée des montagnes Grenobloises où je passe mes journées avec un ordinateur, un papier, et un crayon pour mon métier de rédactrice. Pourtant j'ai soutenu ma thèse il y a plus de 5 ans maintenant, au milieu des briques roses de Toulouse, et surtout des pointes de pipettes dans une blouse blanche de laboratoire ! Mes passions : les romans, ma fille, me baigner dans l'Ardèche, trainer dans les bars (ça c'était avant le covid), et surtout regarder jouer mes deux chats PtitCul et Wifi.
Parle-nous de ta thèse !
Dans chacune de vos cellules, il y a environ 2 mètre d'ADN si on prenait la peine de le dérouler (il faudrait avoir un peu de temps à perdre quand même). Pour pouvoir rentrer dans la cellule (et pour d'autres raisons) l'ADN doit donc s'enrouler sur lui-même en petites pelotes : les chromosomes. Ces chromosomes sont plus ou moins pelotonnés selon les moments de vie de la cellule (oui elle aussi elle a une vie et ses moments). Au cours de la mitose, ce moment où la cellule se divise en deux, donnant deux cellules filles, les chromosomes doivent être à leur maximum de pelotonnage / compaction. C'est très important, car si cette compaction est mal faite, que les pelotes / chromosomes sont un peu trop lâches, notamment à leur centre, alors les forces qui s'exercent sur eux pour les tirer dans une cellule ou dans l'autre s'exercent "mal". Il y a alors une mauvaise répartition, et les deux cellule fille se retrouvent avec le mauvais nombre de chromosomes #cancer, l'une en a trop et l'autre pas assez... J'étudiais en thèse une modification chimique sur une protéine proche de l'ADN. Je me demandais si cette modification pouvait avoir une influence sur le degré de pelotonnage du centre des chromosomes pendant la mitose et donc être impliquée dans les cancers. En gros.
As-tu une anecdote ou un fun fact sur tes années de thèse que tu souhaiterais partager ?
La fois où vers 22H, fatiguée, j'ai laissé tombé le tube contrôle de mon expérience que j'avais mis 3 semaines à préparer ? Non. Peut-être la fois où j'ai respecté bêtement un protocole avec une erreur dedans, et que je me suis réveillée en sursaut pendant la nuit en réalisant que c'était impossible que mon expérience marche avec ce pH : trois semaines de perdues encore... Mais ce sont des histoires tristes, donc je ne vais pas vous raconter ça. Je préfère retenir le temps que j'aimais passer au microscope dans la salle de culture cellulaire, au plus fort grossissement, pour regarder les cellules "danser" dans le liquide quand je les avais trypsinées (détachées de leur boite) pour les passer (les transférer dans une autre en en retirant la moitié pour qu'elles ne soient pas à l'étroit dans leur boite)... Ca ne servait à rien, mais j'aimais bien ça...
Quelle est ta profession actuelle? (quelles sont tes missions, que fais-tu au quotidien ou de façon hebdomadaire, comment vois-tu ton métier, comment es-tu arrivé·e là)
Aujourd'hui je suis rédactrice scientifique en freelance. Au quotidien je fais ce que je préfère : écrire, synthétiser des données, faire de la biblio et de la doc, et apprendre des choses. C'est grâce à la thèse que j'ai vraiment réalisé que j'aimais faire ça. J'ai toujours aimé écrire et faire des recherches. Mais en thèse je me suis rendue compte que j'étais bien la seule à avoir aimé écrire une demande de financement, ou à trouver super sympa d'écrire une intro de thèse....Quelles sont les compétences techniques et les compétences humaines (on parle aussi de soft skills) que tu peux clairement lier, avec le recul, à ton expérience de doctorat ?
Je ne sais pas si le doctorat m'a rendue créative et proactive, ou si j'ai fait un doctorat parce que j'étais créative et proactive... En revanche ce dont je suis sure, c'est que les manips de labo m'ont appris à être hyper rigoureuse. J'ai aussi appris à faire trois manips en même temps. Ca nous parait normal quand on est en thèse. Mais après dans le monde du travail tu te rends compte que beaucoup de gens ne peuvent pas gérer plusieurs choses de front, alors que toi si. Finalement, je pense que le doctorat t'apprend que les choses sont plus complexes qu'il n'y parait, ce qui mène à ne jamais sous-estimer la complexité de quoi que ce soit. Sinon, mais on sort des soft skills peut-être, mais je sais aller chercher et lire des publications. Je me rends compte que c'est quelque chose de fort, car beaucoup de journalistes et de rédacteurs n'ont pas la capacité d'aller lire les articles scientifiques sur lesquels ils écrivent, et encore moins de les critiquer...
Ça fait quoi d'être Docteure, au quotidien ? Est-ce que ça t'a ouvert des portes ? Est-ce que c'est une expérience que tu valorises ?
Le doctorat m'a m'a peut-être ouvert une ou deux portes parfois en rédaction, car un client peut se sentir rassuré par ce diplôme et te faire plus facilement confiance pour te confier une prestation. Celà dit ça m'en a fermé aussi pour certains boulots, car le doctorat apparait encore malheureusement comme un OVNI pour beaucoup de recruteurs. Donc il faut savoir quand le valoriser ou non, en fonction du contexte et de la personne à qui on s'adresse.
Que souhaiterais-tu dire aux autres Docteurs du réseau de l'Université de Toulouse ainsi qu'aux doctorants actuels ? As-tu des conseils ?
Si c'était à refaire je referais une thèse car j'ai adoré l'expérience. Après il faut être conscient qu'avoir un poste dans la recherche aujourd'hui relève du sacerdoce. Du coup il faut prévoir à l'avance ce qu'on veut faire après, moi je ne l'ai pas fait, et j'ai mis plusieurs années à tourner autour du pot. Si vous avez l'occasion de faire une césure pendant la thèse pour aller passer quelques mois dans un univers professionnel qui vous attire (dans une boite de biotech, dans un journal scientifique, etc), cela vous permettra de 1/ tester l'idée ; 2/ vous faire du réseau, pour éviter d'avoir à refaire une formation avec un stage après, comme c'est le cas de beaucoup de docteur.e.s (le mien d'ailleurs puisque j'ai refait une formation en médiation culturelle des sciences, avec un stage à 30 ans...). Donc aujourd'hui vous êtes mieux informés qu'il y a 5 ans, n'attendez pas pour vous poser ces questions....
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